Malgré la croissance significative de nombre de pays africains, la somme du PIB du continent africain est égale à celui de la France. Tels sont entre autres les propos de Barack Obama lors d’un forum Etats-Unis – Afrique tenu à New York. Oui vous avez bien lu, il s’agit de la comparaison de tout un continent (continent constitué de 55 pays) à un pays. Oui. Un seul. Le lien entre le continent africain et la France est certes « infrangible » mais … Avait-il tort ou raison ? Allons chercher !

55 Etats dont la majeure partie avec un faible PIB …

Allons pas à pas, qu’entend-on par PIB au juste ? Le PIB ou encore Produit Intérieur Brut est un indicateur économique permettant la mesure des richesses produites dans un pays ou une zone géographique au cours d’une période donnée. La norme internationale de calcul du PIB de l’Organisation des Nations Unies (ONU) est appelée « Système de comptabilité nationale » en abrégé SCN. Celle en vigueur est le SCN 2008. Lorsque l’on jette un coup d’œil au classement des pays africains selon leur PIB au fil des années l’on peut très vite constater qu’une pléthore d’entre eux ont un PIB extrêmement faible. En faisant la somme des PIB de pays africains de 2013, on obtient 2 513 milliards de dollars américains : on constate que le PIB de l’Afrique correspond à celui de la France ou encore du Brésil. Nous pouvons affirmer que Barack Obama n’avait pas tort.

Le PIB n’est pas toujours fiable …

Tout d’abord, il faut noter qu’il y a plusieurs versions du SCN et celui en vigueur est celui de 2008. De deux, les services nationaux de statistiques ne sont pas toujours formés ou ne possèdent pas toujours les ressources adéquates pour le recueillement et l’analyses des données économiques. Sans oublier que tous les pans de l’économie africaines ne sont pas pris en compte. S’il faille donc bien regarder, seuls sept pays africains fournissent des données économiques fiables (conformes au SCN 2008). Sans oublier qu’onze d’entre eux utilisent la deuxième version de 1968. Le calcul est vite fait, bien des données ne peuvent qu’être biaisées. De plus, il ne faut pas oublier que la plupart des pays africains n’actualisent pas toujours leurs données. Morten Jerven, économiste à l’Université des Sciences de la vie en Norvège et à l’Université Simon Fraser du Canada déclare que les faibles PIB de la plupart des pays africains contiennent de larges marges de déductions d’erreur.

La PPA comme indicateur …

Le PIB peut induire en erreur en ce sens où d’après Mizuki Yamanaka (statisticien à la Banque Mondiale), s’agissant de la comparaison de la production de plusieurs pays, les taux du marché ne reflètent pas le coût de la vie. La Parité de Pouvoir d’Achat (PPA) est ainsi utilisée pour éviter toute confusion. Une des faiblesses de l’utilisation de la PPA se trouve dans l’absence de plusieurs biens et services des pays du Nord dans les pays du Sud (selon Angus Deaton et Alan Heston, respectivement Prix Nobel d’économie et chercheur de l’Université de Pennsylvanie). La PPA n’ayant pas d’alternative, le Programme de Comparaison Internationale a fait une comparaison en 2014 entre l’Afrique (avec les données de 52 pays) et la France. Comparaison basée sur des données du PIB ajustées aux différences des pouvoirs d’achat : 

  • Afrique : 5,35 trillions de dollars américains (1 trillion = 1 000 milliards)
  • France : 2,66 trillions de dollars américains

Avec cette analyse, l’assertion de Barack Obama pourrait être revue.

A chaque situation son indicateur …

Oui nous n’en avons pas encore fini. Patience. A chaque contexte son indicateur. Morten Jerven nous rappelle que la comparaison de deux pays pour avoir une idée de la situation économique globale d’une région ne doit pas prendre en compte le PIB ajusté à la PPA mais la valeur monétaire de la période. L’économiste kenyan David Ndii (administrateur de la société d’intelligence économique Africa Economics) quant à lui fait comprendre qu’il n’existe pas d’indicateur unique applicable à toute situation.

Somme toute, le fondement de l’assertion de Barack Obama dépend totalement du contexte. De plus, il existe deux manières de comparer les PIB de plusieurs pays. La première méthode consiste à la conversion de la valeur marchande de la période du PIB en dollars américains: il s’agit du PIB aux prix du marché. Et la seconde consiste à ajuster le PIB en prenant en compte les différences des pouvoirs d’achat : il s’agit du PIB basé sur la PPA. Ainsi, dans le cas de l’utilisation de la première méthode, Barack Obama a raison. Sachant qu’en prenant en compte les prix de la période conduit à des résultats erronés du fait du large écart entre les pouvoirs d’achat. Dans cette optique Barack Obama a tort. Toutefois bon nombre d’analystes penchent pour la première méthode. On ne peut toutefois pas nier la faiblesse des chiffres concernant le PIB des pays africains. Une telle assertion viendrait elle comme une sonnette d’alarme visant à faire comprendre aux pays africains, de manière globale, qu’ils doivent “reconsidérer” leur relation avec la France ? Mais encore, est-ce un message qui incite à une prise de conscience à propos du potentiel réel du continent, qui pour l’heure, est loin d’être exploité de manière optimale ?

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CEO AfrikaTech

Comme beaucoup de personnes j’ai connu l’Afrique à travers des stéréotypes : l’Afrique est pauvre, il y a la guerre, famine… Je suis devenu entrepreneur pour briser ces clichés et participer à la construction du continent. J’ai lancé plusieurs entreprises dont Kareea (Formation et développement web), Tutorys (Plate-forme de e-learning), AfrikanFunding (Plate-forme de crowdfunding). Après un échec sur ma startup Tutorys, à cause d’une mauvaise exécution Business, un manque de réseau, pas de mentor, je suis parti 6 mois en immersion dans l’écosystème Tech au Sénégal. J’ai rencontré de nombreux entrepreneurs passionnés, talentueux et déterminés. A mon retour sur Paris je décide de raconter leur histoire en créant le média AfrikaTech. L'objectif est de soutenir les entrepreneurs qui se battent quotidiennement en Afrique en leur offrant la visibilité, les connaissances, le réseautage et les capitaux nécessaires pour réussir. L'Afrique de demain se construit aujourd'hui ensemble. Rejoignez-nous ! LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/boubacardiallo

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