Lancé officiellement en 2016, ce « Buzzfeed africain » revendique 4,5 millions de lecteurs mensuels. Après avoir conquis le Kenya et le Nigeria, la start-up ghanéenne a encore faim.

C’est la tête froide, mais à un rythme bien soutenu, que Jesse Ghansah avance ses pions. En deux ans seulement, le PDG d’OMG Digital a réussi à imposer son entreprise comme le nouveau « Buzzfeed africain ». Entre le Ghana, le Nigeria et le Kenya, ce site d’information en ligne pour les 18-30 ans revendique pas moins de 4,5 millions de lecteurs mensuels. En 2017, OMG Digital faisait un chiffre d’affaires avoisinant les 200 000 dollars (176 000 euros). En 2018, l’entreprise sera à l’équilibre. Et dès l’année prochaine, elle envisage d’être bénéficiaire. Fort de ce succès, le jeune entrepreneur de 26 ans ne compte pas s’arrêter là.

Tout a commencé en 2013. « Nous étions frustrés de ce que proposaient les médias traditionnels d’information sur le web, c’était impersonnel. Alors, avec trois amis, nous avons créé notre propre blog : un site de culture pop et de divertissement destiné à la génération Y. C’était l’époque où, au Ghana, l’utilisation de l’internet mobile était en plein boom », se souvient le jeune homme. Mais OMG Ghana n’est alors qu’une activité de complément, pour Jesse Arhin Ghansah, Prince Boakye Boampong et Dominic Ghansah, les trois cofondateurs. « Nous alimentions nous-même le site, et il générait des petits revenus. Suffisamment pour payer nos loyers, mais pas assez pour en vivre », continue Jesse.

Les cofondateurs d’OMG Digital (Facebook)

Décollage vertigineux

Dans le même temps, Dominic et Prince travaillent à la création d’une plate-forme de streaming musicale (bigX media), tandis que Jesse est investi dans un projet de e-commerce. Mais les trois compères peinent à trouver des financements pour faire décoller leurs projets. Il se rendent à l’évidence : c’est bien sur le développement de leur site, arrivé à 800 000 lecteurs mensuels, qu’il faut se concentrer.

Et c’est en 2015 que la machine s’emballe. OMG Ghana est d’abord accepté dans un programme de pré-incubation par la société de financement précoce Y Combinator (YC), en Californie. En échange de 1 % de son capital, l’entreprise bénéficie de 20 000 dollars, et ses fondateurs sont invités à un stage de neuf semaines dans la Silicon Valley. À l’issue de ce stage, l’entreprise est retenue pour intégrer l’incubateur principal. OMG cède à nouveau 7 % de son capital, en échange de 120 000 dollars. « Nous devons beaucoup à YC. En plus de nous financer, ils nous ont poussés à être plus ambitieux. Ce sont eux qui nous ont suggéré de nous exporter au Kenya et au Nigeria. Nous avions un peu peur, mais en appliquant à la lettre la méthode employée au Ghana, ça a fonctionné », raconte Jesse. OMG Ghana devient OMG Digital.

Une question de méthode

À la sortie de l’incubateur, YC offre à ses start-up l’opportunité de vendre leur projet à des investisseurs. À la clé, des partenariats avec le groupe de média américain Comcast, les sociétés de capital-risque américaines Soma Capital et Social Capital, et le fonds d’investissement français Kima Ventures. Soit 1,1 million de dollars, réuni dès 2016 et annoncés en 2017. « Tout cet argent, nous avons d’abord pu le réinvestir dans des emplois au Ghana, au Nigeria et au Kenya, et nous sommes en train de développer os propres studios vidéo », détaille Jesse. Aujourd’hui, l’entreprise emploie 15 salariés et des indépendants, mais les deux comparses de Jesse Arhin Ghansah, Prince Boakye Boampong et Dominic Ghansah, ont quitté l’aventure il y a un an.

Sheldon Amoafo rejoint l’aventure en 2016 en tant que directeur Ghana. Pour lui aussi, tout est une question de méthode. « Notre modèle est simple : nous créons des contenus courts, des listicles (court texte écrit sous forme de liste), avec des images, des vidéos. C’est du contenu auquel les lecteurs s’identifient facilement. Et si nous avons choisi le Nigeria, c’est parce que le marché et le lectorat y sont immenses. Au Kenya, le lectorat n’est pas si important, mais en termes de marché de capitaux, le pays nous permet de sécuriser nos revenus. Les clients et publicitaires y sont nombreux. »

Le Cameroun pour les premiers pas en Afrique francophone

Toujours avec méthode, Jesse veut entrer dans une nouvelle phase de développement de son entreprise. Fort de sa base de lecteurs, OMG Digital lorgne de nouveaux pays. Le site doit ouvrir une antenne en Afrique du Sud dès l’été 2019. Puis ce seront le Zimbabwe et la Tanzanie. « Il était plus naturel pour nous de nous tourner d’abord vers les marchés anglophones. Nous avons tout de même étudié quelques pays en Afrique de l’Ouest, notamment la Côte d’Ivoire. Mais les annonceurs n’étaient pas assez nombreux », explique l’entrepreneur. Pour son entrée en Afrique francophone, Jesse a plutôt jeté son dévolu sur le Cameroun, dans lequel il voit un fort potentiel. « Nous allons lancer quelques expérimentations dans l’année à venir », promet-il.

Des marchés qu’il va falloir prendre, avant que la concurrence s’en charge. « Il y a désormais de gros acteurs sur le continent », poursuit Jesse, qui n’hésite pas à se comparer à Vice, à Kombini et même à la BBC et au Washington Post. « Autant d’acteurs qui ont aussi misé sur la vidéo, et qui ont une grosse force de frappe. » Mais là encore, le jeune homme veut garder la tête froide. Il admet volontiers avoir déjà été approché par au moins deux de ses concurrents. « Pour le moment, nous voulons grossir autant que nous le pouvons. Nous pourrions très bien continuer de lever des fonds et attirer des sociétés de capital-risque, et continuer de nous développer en tant qu’entreprise indépendante. Mais si nous trouvons un partenaire qui partage notre vision, nous restons ouverts, » assure-t-il.

Jeune Afrique

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CEO AfrikaTech

Comme beaucoup de personnes j’ai connu l’Afrique à travers des stéréotypes : l’Afrique est pauvre, il y a la guerre, famine… Je suis devenu entrepreneur pour briser ces clichés et participer à la construction du continent. J’ai lancé plusieurs entreprises dont Kareea (Formation et développement web), Tutorys (Plate-forme de e-learning), AfrikanFunding (Plate-forme de crowdfunding). Après un échec sur ma startup Tutorys, à cause d’une mauvaise exécution Business, un manque de réseau, pas de mentor, je suis parti 6 mois en immersion dans l’écosystème Tech au Sénégal. J’ai rencontré de nombreux entrepreneurs passionnés, talentueux et déterminés. A mon retour sur Paris je décide de raconter leur histoire en créant le média AfrikaTech. L'objectif est de soutenir les entrepreneurs qui se battent quotidiennement en Afrique en leur offrant la visibilité, les connaissances, le réseautage et les capitaux nécessaires pour réussir. L'Afrique de demain se construit aujourd'hui ensemble. Rejoignez-nous ! LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/boubacardiallo

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