Le génie créateur africain se libère au-delà de la copie technologique. Un élève namibien de 19 ans vient de fabriquer un prototype de téléphone adapté à sa réalité namibienne.
Pour les Afrophobes qui n’ont pas étudié l’histoire de l’Humanité, le continent serait incapable d’élaborer la moindre technologie. L’Afrique serait tout juste bonne à fabriquer ce que d’autres ont conçu, par la magie condescendante de la délocalisation ou par le biais honteux de la contrefaçon.
L’Algérie n’a pas revendiqué l’invention des hélicoptères de combat ; elle s’apprête tout de même à en produire, dans une version haut de gamme 100% « made in Algeria », une version destinée même, en grande partie, à l’exportation. Mais quelle fierté y aurait-il à revendiquer les droits d’auteur sur des engins de mort ?
Plus glamour est le secteur de la télécommunication. Bien avant la fibre optique ou les communications satellitaires, l’Afrique, dans ce domaine, pouvait s’enorgueillir de maîtriser la transmission de messages par le bendré. Et a-t-on réellement besoin de s’envoyer des infos à distance, quand la tradition ancestrale sait vous téléporter via la foudre et quelques incantations ?…
L’Afrique réinvente la technologie
Au marathon technologique 2.0., sur un marché déjà bien connecté, l’Afrique ne décroche guère du peloton de tête. Il y a plus de 4 ans était lancée, au Congo-Brazzaville, la toute première tablette tactile conçue sur le continent, baptisée « Way-C ». Son inventeur, l’entrepreneur congolais Vérone Mankou, envisageait de la commercialiser dans dix pays d’Afrique de l’Ouest, en Belgique, en France et en Inde.
L’Afrique réinvente la technologie moderne, parfois en mieux, notamment dans le domaine de la téléphonie mobile. Les grands fabricants occidentaux ne s’adressent guère prioritairement aux pays peu pourvus en électricité. Qu’à cela ne tienne. Au Rwanda, où près de 80% de la population n’a pas accès au courant, un jeune entrepreneur a créé la structure Ared (African Renewable Energy Distributor) qui gère des unités de recharges pour cellulaires fonctionnant à l’énergie solaire.
Crowdfunding de proximité
Toujours plus fort, après le téléphone sans fil et le téléphone sans réseau électrique, voici venu le téléphone sans carte SIM. Un élève namibien de 19 ans vient de réaliser cet exploit technologique. Autre détail qui a son importance sur un continent où se combinent électrification insuffisante et faible pouvoir d’achat : le cellulaire de Simon Petrus n’a pas besoin de crédit de recharge. Il peut émettre des appels grâce à l’utilisation de fréquences radio. Et comme le multimédia est tendance, il offre également la possibilité de capter une chaîne de télévision locale.
Pour fabriquer son téléphone, l’élève ingénieux n’a utilisé que des objets bien anodins, récupérés dans une vie quotidienne assez peu nourrie de technologie sophistiquée : pièces de rechange de téléphone, composants de téléviseur, ampoules et carcasses de chargeurs. Pour l’ensemble de sa démarche – brainstorming et développement du prototype compris -, il n’a dépensé que 146 dollars, somme obtenue par une sorte de crowdfunding de proximité. Pour la suite, quelques partenaires étrangers auraient déjà manifesté leur intérêt pour la capacité d’innovation de Simon Petrus. L’ont-ils contacté sur son téléphone sans SIM ?
Jeune Afrique
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