Pour l’industrialisation en Afrique, les grands changements structurels et économiques qu’a connu le monde lors des derniers siècles ont ce point en commun : une révolution technologique transcrite par des changements de process et par la recherche d’automatisation de ces derniers. La croissance de la demande et le changement de style de vie des populations a toujours exigé que la production intérieure puisse répondre, au risque d’une asphyxie insidieuse appuyée par des importations fortes.

L’industrialisation semble donc être ce pas, cette solution “miracle” pour le développement d’un pays. Si la preuve a été faite dans les pays aujourd’hui appelés “pays développés”, les pays dits “émergents” ou sous/peu développés pourraient-ils s’en inspirer pour se permettre des projections plus gaies pour l’avenir ? Quid de l’Afrique dans ce schéma ? Si l’on admet que l’industrialisation est une / la solution pour accélérer la croissance socio-économique de l’Afrique, par quoi faudrait-il commencer ?

Telle est la problématique que nous explorerons à travers cette série d’article consacrée aux secteurs d’activités à industrialiser en priorité en Afrique.

Une Afrique qui croit et qui y croit

L’industrialisation est fondamentale pour le développement économique d’un pays. Cependant, son absence « évidente » sur le berceau de l’humanité semble constituer un obstacle pour les économies africaines qui restent largement tributaires de l’agriculture et des produits non transformés.

Au cours des deux dernières décennies, des pays africains ont démontré qu’ils pouvaient maintenir une trajectoire de croissance forte et surmonter «  la malédiction de ressources naturelles ». En dépit des facteurs externes défavorables, ces derniers entendent bien démontrer qu’ils sont capables de s’adapter à la chute des cours des matières premières et de générer une croissance économique pérenne et  inclusive en diversifiant leur économie, en stimulant la productivité et en adoptant des politiques en faveur des pauvres.

L’industrialisation viendrait donc comme une réponse aux « limites » observables aujourd’hui en Afrique. Une question se pose cependant : quels secteurs industrialiser en priorité ?

Explorons l’agroalimentaire.

L’agroalimentaire      

Aucune région au monde ne s’est jamais industrialisée sans transformer son secteur agricole. L’Afrique a besoin d’industries agroalimentaires. Pour les économies africaines, l’agriculture serait la clé de l’accélération de la croissance, de la diversification et de la création d’emplois. Ce secteur représente à lui seul 16,2% du PIB du continent et fournit du travail à plus de 60% de sa population.

Akinwumi Adesina, le président de la Banque africaine de développement (BAD) rappelait, via La Tribune Afrique, les enjeux stratégiques dont est porteur le secteur agricole pour l’industrialisation et le développement des pays africains. L’agriculture africaine recèle un formidable potentiel, notamment en matière d’investissements. Entreprises et investisseurs africains doivent saisir cette opportunité et libérer ce potentiel pour l’Afrique et les africains.

L’Afrique devrait commencer par traiter l’agriculture comme un secteur d’activités commerciales et s’inspirer sans plus tarder des expériences menées ailleurs, comme en Asie du Sud-est dont la croissance économique rapide s’est appuyée sur une industrie agroalimentaire et agro-industrielle forte.

Dans la pratique, il s’agirait de stimuler la croissance dans les secteurs et zones dans lesquels les populations pauvres vivent et travaillent. Il faut relever que la productivité du secteur agricole reste largement insuffisante malgré l’engagement résolu des pays africains à changer la donne. Il est donc essentiel de soutenir  les petits exploitants en leur donnant accès à des technologies modernes, des services financiers adaptés et un meilleur accès aux marchés.

Pour stimuler l’agro-industrialisation, la Banque africaine de développement va investir 24 milliards de dollars dans l’agriculture et le secteur agroalimentaire pendant les dix prochaines années. C’est 400% de plus que le niveau de financement actuel qui s’élève à 600 millions de dollars par an.

Le manque d’infrastructures accroît le coût de l‘activité économique, dissuadant les entreprises agroalimentaires de s’installer en zone rurale. Pour y remédier, il est possible de créer des zones agro-industrielles et des zones de transformation des cultures vivrières dans les régions rurales. Associées à des infrastructures améliorées, routes, installations hydriques et électriques, voire des logements appropriés, ces zones permettront de réduire les coûts opérationnels pour les entreprises privées du secteur agroalimentaire.

Cela permettra de créer de nouveaux marchés pour les agriculteurs, multipliera les opportunités économiques en milieu rural, stimulera l’emploi et y attirera des investissements nationaux et étrangers.

Considéré comme une destination phare par les investisseurs, le continent africain gagnerait à réduire son déficit en infrastructures, pour soutenir l’industrialisation. Une tâche gigantesque qui devrait coûter 93 milliards de dollars par an au cours de la prochaine décennie. Le chantier concerne les routes, l’accès aux technologies de l’information et de la communication et à l’électricité. Ce dernier point est un défi important sur le continent. Les coupures fréquentes d’électricité coûteraient à l’économie africaine entre 1 et 4 points de pourcentage de PIB.

Aujourd’hui, l’Afrique subsaharienne pâtit de son manque d’intégration au commerce mondial. Ses camions de marchandises ne sont pas très rapides et ses grands ports sont constamment  embouteillés. Pourtant, la hausse des volumes d’échanges favoriserait l’augmentation du trafic de container en moyenne de 6 à 8% au cours des trente prochaines années selon la Banque africaine de développement.

Pour l’heure, l’absence d’industrie entraîne un manque à gagner important comme l’illustre l’exemple du cacao : l’Afrique de l’Ouest produit et exporte 65% des graines de cacao dans le monde. La raison est simple, cette zone ne les transforme pas, elle ne bénéficie que de 3,5% à 6% du prix final d’une tablette de chocolat.

Le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire pourrait pourtant représenter près de 1 000 milliards de dollars d’ici 2030.

Les Etats d’Afrique subsaharienne surtout à l’Est du continent (Kenya, Ethiopie, Rwanda, Tanzanie, etc.) développent leurs modèles industriels. A titre d’exemple, le Kenya est désormais le troisième exportateur mondial de fleurs coupées. Une activité qui emploie plus de 500 000 personnes. Et cette filière a exporté 135 601 tonnes en 2014 selon le Bureau national des statistiques du pays. L’amélioration et l’accélération des processus, l’industrialisation d’une telle activité pourrait faire croître ces chiffres notamment grâce à des gains de productivité importants.

Le numérique comme tremplin pour l’industrialisation de l’Afrique ?

Tout en développant ses capacités industrielles, l’Afrique devrait cependant se préparer à l’avenir du numérique en investissant dans l’internet, les technologies numériques et les compétences liées à l’innovation. La révolution numérique pourrait en effet conduire à relocaliser certaines productions.

D’après une étude du think tank londonien Overseas Development Institute (ODI), les robots (financement et exploitation compris) dans l’industrie du meuble aux Etats-Unis reviendront moins cher que les salariés d’une usine du Kenya de cette même industrie d’ici en 2033 (et entre 2038 et 2042 pour l’Ethiopie).

Le temps est donc compté pour former des scientifiques, des techniciens et des ingénieurs africains, pour permettre de s’arrimer aux retombées de l’industrialisation en Afrique et tirer le meilleur du potentiel de cette dernière.

lire aussi : https://www.afrikatech.com/start-business/what-is-industrialization/

Autre article : https://issuu.com/africandevelopmentbank/docs/industrialize_africa_french_final_w

About The Author

CEO AfrikaTech

Comme beaucoup de personnes j’ai connu l’Afrique à travers des stéréotypes : l’Afrique est pauvre, il y a la guerre, famine… Je suis devenu entrepreneur pour briser ces clichés et participer à la construction du continent. J’ai lancé plusieurs entreprises dont Kareea (Formation et développement web), Tutorys (Plate-forme de e-learning), AfrikanFunding (Plate-forme de crowdfunding). Après un échec sur ma startup Tutorys, à cause d’une mauvaise exécution Business, un manque de réseau, pas de mentor, je suis parti 6 mois en immersion dans l’écosystème Tech au Sénégal. J’ai rencontré de nombreux entrepreneurs passionnés, talentueux et déterminés. A mon retour sur Paris je décide de raconter leur histoire en créant le média AfrikaTech. L'objectif est de soutenir les entrepreneurs qui se battent quotidiennement en Afrique en leur offrant la visibilité, les connaissances, le réseautage et les capitaux nécessaires pour réussir. L'Afrique de demain se construit aujourd'hui ensemble. Rejoignez-nous ! LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/boubacardiallo

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